Les complications oculaires de la corticothérapie prolongée lors des conjonctivites allergiques
INTRODUCTION
Les conjonctivites allergiques représentent à l’heure actuelle la pathologie inflammatoire la plus fréquente de l’œil. Cette affection est saisonnière dans les pays froids, mais perannuelle sous nos climats. C’est une affection souvent bénigne, mais elle est parfois très invalidante chez l’enfant pouvant perturber sa scolarité.
Structure de la conjonctive et allergie :
A- Muqueuse directement exposée aux agressions de l’air ambiant
Equipement immunologique complet
Altération de la réponse normale aux agressions
ALLERGIE : Moyen de défense de la conjonctive
Epithélium : Mucocytesmucus
Élimination des débris ; support Ig A sécrétoires
Etudes par : raclage, frottis et emprunte conjonctivale +++
Densité des mucocytes et présence anormale : éosinophiles, basophiles et mastocytes.
Chorion: à l’état normal, il est riche en cellules inflammatoires: lymphocytes, plasmocytes et mastocytes.
MASTOCYTES
Rôle central dans la réaction d’allergie immédiate. Sa dégranulation lorsque l’allergie se fixe sur ses Ig E membranaires spécifiques, déclenche une réaction en chaîne où interagissent les médiateurs libérés, les cellules inflammatoires et les cibles effectrices.
HISTAMINE
Place particulière de l’histamine. Ses effets sont immédiats et intenses :
- Augmentation du calibre et de la perméabilité vasculaire : rougeur et œdème oculaire.
- Prurit caractéristique des réactions d’allergie immédiate.
- Stimulation de la production de prostaglandines.
- Attraction des éosinophiles et stimulation de la production des radicaux libres oxygénés par ceux-ci.
EOSINOPHILES
A l’état normal, il n’existe pas d’éosinophiles dans le chorion ou l’épithélium conjonctival. Leur présence caractérise un état allergique. Ils intensifient et prolongent la réaction allergique.
Explorations cliniques d’une conjonctivite allergique
1. Signes fonctionnels :
par ordre de fréquence
- Prurit +++
- Œdème localisé des paupières
- Rougeur conjonctivale
- Larmoiement.
2. Antécédents et histoire de la maladie
Mode évolutif : permanent ou intermittent : printemps- été
Influence du lieu d’habitation ou de travail :
- sec : pollinose.
- Humide : pneumallergène
Passé immunologique :
a- ATCD d’allergie respiratoire, urticaire, eczéma et rhinite spasmodique
b- ATCD familiaux.
c- Influence des traitements antiallergiques précédents.
3. Examen ophtalmologique
- Acuité visuelle
- Etude de la réfraction (astigmatisme)
- Parfois examen orthoptique
- Examen du bord des paupières (blépharite)
- Everser les paupières.
4. Enquête allergologique clinique cutanée Réalisée par l’allergologue.
Mise en route s’il existe des éléments en faveur de l’allergie (Ig E des larmes, interrogatoire) et que l’on veut rechercher un allergène précis.
FORMES CLINIQUES
A. Chez l’adulte
1- Conjonctivite allergique aiguë
Très fréquente surtout dans les pays méditerranéens :
- Saisonnière liées à l’allergie au pollen
- Signes fonctionnels intenses avec prurit très important
- LAF : hyperhémie conjonctivale + larmoiement
- Associée dans 50% des cas à une rhinite
- Diagnostic : l’interrogatoire retrouve : une allergie au pollen, poils d’animaux ou allergie alimentaire.
Traitements : antihistaminiques, corticoïdes locaux ou généraux (pollinose), désensibilisation spécifique.
2- Conjonctivite allergique chroniques ou perannuelles
Les plus fréquentes en milieu urbain.
- Signes fonctionnels le plus souvent modérés
- Rhinite allergique dans 20 à 30% des cas
- Tests positifs aux pneumallergènes, poussière ou acariens (80%)
Traitements : Eviction de l’allergène, Collyre antihistaminiques et antidégranulants , mastocytaires , Désensibilisation spécifique .
3- Conjonctivite semi- printanière
- Forme saisonnière déclenchée par l’ensoleillement et la chaleur (pollen)
- S’étend de Mai-Avril à septembre
- Signes fonctionnels très violents
- Examen LAF subnormal
- Allergie à la poussière et acariens
Traitement : Sensible aux antihistaminiques, antidégranulants mastocytaires et désensibilisation spécifique
4- Conjonctivite de la dermatite atopique
- ATCD personnels et familiaux d’allergie
- Eczéma diffus, élévation des Ig E sérique, eczéma très important des paupières, cataracte atopique
- Inflammation conjonctivale variable : de modéré à très grave allant jusqu’au symblepharon
- Cornée : kératopathie sévère dans ¼ des cas avec vascularisation
Traitement : Difficile, associant tous les antiallergiques classiques à la corticothérapie locale et générale
B. Kératoconjonctivite printanière de l’enfant (vernal keratoconjonctivitis)
- Début dans l’enfance, après 2 ans et avant 10 ans (65 à 85%)
- Garçon dans 65 à 85% des cas
- Bilatérale asymétrique
- Evolution par poussées printanière et estivale parfois perannuelles (pays chauds)
- La lumière solaire déclenche ou exacerbe les poussées
- Très fréquente dans les pays chauds
Signes fonctionnels
- Prurit
- photophobie et blépharospasme
- larmoiement
LAF : Examen parfois difficile, gêné par les blépharospasme (novésine)
Conjonctivite palpébrale supérieure : pavés caractéristiques
Limbe : soit épaississement et opacification de la conjonctivite limbique. Nodules un peu saillants et gélatineux (nodules de TRANTAS), pannus limbique supérieur.
Cornée : atteinte dans ¼ des cas. Le plus souvent des kératites ponctuées superficielles contemporaine des poussées. Ulcère profond, ovalaire, 1/3 supérieur, comblé par une plaque mucoïde et fibrineuse (empêchant la reépithelisation. Parfois néo-vaisseaux avec cicatrice.
Conjonctivite palpébrale sup.: pavés caractéristiques
EVOLUTION
- Résolution spontanée en 2 à 10 ans de manière imprévisible.
- BAV dans 27% des cas : par atteinte cornéenne ou complication de la corticothérapie.
- La forme limbique est la plus fréquente dans les pays chauds (pas d’atopie).
- La forme palpébrale est plus fréquente dans les pays tempérés (atopie).
TRAITEMENT
- Traitements usuels : Eviction des allergènes, antihistaminiques, antidégranulants mastocytaires et corticoides (complications).
- Lutte contre le rayonnement ultraviolet et le vent (verres filtrants).
- La découverte du métabolisme de l’acide arachidonique a suggéré l’utilisation des antiprostaglandines, aspirine et AINS (mais leucotriéne).
- Parfois désensibilisation.
- Formes graves : cyclosporine en collyre
- Parfois cryothérapie des pavés conjonctivaux ou greffe de muqueuse buccale.
- Résolution spontanée : rassurer les parents.
Complications des corticoïdes
Les effets indésirables des corticoïdes : liés à leur propriétés pharmacologiques
Prévisibles, indissociables de l’action thérapeutique, souvent dose- dépendants.
Représentés par l’apparition de cataracte et de glaucome cortisonés. Ce dernier est dans la pratique ophtalmologique courante l’une des causes les plus fréquentes d ’HTO secondaires.
CONCLUSION
Cataracte + glaucome cortisonés : complications graves et fréquentes de la corticothérapie au long cours surtout locale
Risque malvoyance voire cécité
Prévention par un examen soigneux et régulier de toute personne traitée par des corticoïdes au long cours surtout par voie locale et de règle.
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