Vers une classification internationale homogène des neuroblastomes ? L’International Neuroblastoma Risk Group Classification System (INRG).
Le neuroblastome est une tumeur remarquable par son extrême hétérogénéité. En effet, certaines lésions peuvent évoluer vers la maturation et la régression spontanée alors que d’autres progressent malgré des traitements intensifs. Cette hétérogénéité est corrélée à certains facteurs cliniques et biologiques et différentes classifications existent afin de déterminer les groupes de risque et de traitement. Ainsi le groupe européen SIOPEN s’appuie sur l’âge et le risque opératoire définis par l’imagerie et l’existence ou non d’une amplification de l'oncogène N Myc alors que le COG utilise l’âge, le statut post chirurgical, l’amplification de N Myc et la ploïdie. D’autres facteurs de risque ont été décrits plus récemment et viennent compliquer cette classification (anomalie de 1p ou de 11q). Un travail impressionnant a été réalisé par l’International Neuroblastoma Risk Group sur 8800 enfants pour déterminer au mieux un nouveau système de classifications des neuroblastomes (INRGSS). Deux articles paraissent ce mois-ci dans le Journal Of Clinical Oncology pour exposer ce travail qui aboutit à répartir les patients dans 16 groupes de risques différents.
Les deux articles sont intimement liés puisque le premier article expose la méthodologie retenue par le groupe de travail et les différents facteurs pronostics qui en ressortent avec les EFS et OS de chaque groupe. Il montre comment les enfants sont au final répartis en groupes dits de très bas risque, de bas risque, de risque intermédiaire ou de haut risque. Le second article montre comment les malades ayant une lésion localisée sont répartis en 2 groupes de risque chirurgical différent sur l'imagerie (groupes L1 et L2). Ceci permet de comprendre l’ensemble de la classification.
Le premier article reprend donc à partir de la classification INSS classique le pronostic des patients :
Ainsi pour les lésions stade 1,2, 3 de la classification INSS(patients non métastatiques) et 4S le principal facteur pronostic est le degré de maturité de la tumeur (les lésions matures étant d’excellent pronostic elles ne seront plus discutées dans la suite de la classification et regroupées au sein d'un groupe de très bas risque). Pour les lésions moins matures (neuroblastomes ou ganglioneuroblastomes nodulaires) c’est l’amplification de l’oncogène N Myc qui est le principal facteur pronostic.
· Pour les enfants présentant un neuroblastome de stade 1 sans amplification de N Myc, l’anomalie de 1p joue un rôle pronostic en terme d’EFS mais non d’OS et n’est finalement pas retenu pour la classification.
· Pour les patients des groupes 2 ou 3 et 4S sans amplification de N Myc c’est l’âge qui est le principal facteur pronostic et le « cut off » est fixé à 18 mois (et plus à 12 mois comme auparavant). Dans ces 2 groupes (plus ou moins de 18 mois) les anomalies de 11q sont pronostiques. Pour les patients de plus de 18 mois on regroupe toutes les tumeurs peu différenciées (quelque soit le statut de 11q) et les enfants avec une anomalie de 11q.
· Pour les enfants présentant un neuroblastome de stade 1, 2, 3 ou 4S amplifiant N Myc, le taux de LDH revêt une importance pronostic avec un « cut off » fixé à 587UI/L mais n’est finalement pas retenu dans la classification finale (caractère peu spécifique de cette anomalie biologique).
Pour les patients métastatiques (stade 4 INSS) l’âge intervient en premier lieu (plus ou moins de 18 mois) ainsi que l’amplification de l’oncogène N Myc et la ploïdie (N Myc n’est cependant pas retenu après 18 mois dans ce groupe de patient métastatique).
Le second article établit une nouvelle classification des patients présentant une tumeur localisée en fonction de l’existence ou non de facteurs de risques chirurgicaux à l’imagerie (ce qui est une nouveauté par rapport à la classification INSS qui était post chirurgicale). Les facteurs de risque sont très bien définis dans un tableau reprenant les différentes localisations tumorales, l’enserrement des vaisseaux, des nerfs et l’envahissement du canal rachidien. On définit ainsi 2 groupes de patients : le groupe L1 sans facteur de risque à l’imagerie et le groupe L2 avec facteur(s) de risque.
Au final cette classification permet de répartir les patients en 16 groupes de la manière suivante :
1. Tumeurs de très bas risque : |
a. Tous les patients avec une tumeur mature (L1 ou L2) |
b. Patients L1 ayant une tumeur n’amplifiant pas N Myc |
c. Patient MS (ancien 4S) de moins de 18 mois n’amplifiant pas N Myc et sans aberration de 11q |
2. Groupe de bas risque : |
a. Patient L2 de moins de 18 mois, sans amplification de N Myc et sans aberration de 11q |
b. Patient L2 de plus de 18 mois ayant un ganglioneuroblastome ou un neuroblastome différencié sans amplification de N Myc et sans aberration de 11q |
c. Patients métastatiques de moins de 18 mois sans amplification de N Myc mais hyperdiploïde |
3. Groupe de risque intermédiaire : |
a. Patients L2 de moins de 18 mois sans amplification de N Myc mais avec des aberrations de 11q |
b. Patient L2 de plus de 18 mois ayant un ganglioneuroblastome ou un neuroblastome différencié sans amplification de N Myc et avec aberration de 11q ou indifférencié quelque soit le statut de 11q |
c. Patients métastatiques de moins de 12 mois sans amplification de N Myc mais diploïde |
d. Patients métastatiques de 12 à 18 mois sans amplification de N Myc mais diploïde |
4. Groupe de haut risque : |
a. Patients L1 avec amplification de N Myc |
b. Patients L2 de plus de 18 mois avec amplification de N Myc |
c. Patients métastatiques de moins de 18 mois avec amplification de N Myc |
d. Patients métastatiques de plus de 18 mois quelque soit le statut de N Myc |
e. Patient MS (ancien 4S) de moins de 18 mois n’amplifiant pas N Myc mais avec des anomalies de 11q |
f. Patient MS (ancien 4S) de moins de 18 mois amplifiant pas N Myc |
Cette nouvelle classification, certes complexe, fait intervenir les principaux facteurs de pronostic identifiés dans une cohorte de 8800 patients. Elle permettra, on l’espère, de répartir les patients dans des groupes plus homogènes permettant des comparaisons plus aisées à l’avenir entre les différents groupes coopérateurs.
1-Susan L. Cohn, Andrew D.J. Pearson, Wendy B. London, Tom Monclair, Peter F. Ambros, Garrett M. Brodeur, Andreas Faldum, Barbara Hero, Tomoko Iehara, David Machin, Veronique Mosseri, Thorsten Simon, Alberto Garaventa, Victoria Castel, and Katherine K. Matthay. The International Neuroblastoma Risk Group (INRG) Classification System: An INRG Task Force Report. J Clin Oncol 27:289-297.
2- Tom Monclair, Garrett M. Brodeur, Peter F. Ambros, Herve´ J. Brisse, Giovanni Cecchetto, Keith Holmes, Michio Kaneko, Wendy B. London, Katherine K. Matthay, Jed G. Nuchtern, Dietrich von Schweinitz, Thorsten Simon, Susan L. Cohn, and Andrew D.J. Pearson. The International Neuroblastoma Risk Group (INRG) Staging System: An INRG Task Force Report. J Clin Oncol 27:298-303.