Les tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST)
Les tumeurs stromales gastro-intestinales sont des proliférations mésenchymateuses développées à partir de la paroi du tractus digestif, de morphologie fusiforme ou épithélioïdes. La fréquence des tumeurs stromales digestives diminue de l’estomac vers le rectum.
· Œsophage : 5 % de l’ensemble des GIST.
· Estomac : 50-70 %
· Grêle : 20-30 %
· Colon-rectum : < 10 %
· Péritoine : < 5 %
Les circonstances de découverte varient en fonction de la localisation : à l’occasion d’une endoscopie digestive haute faite pour lésion gastrique, douleurs abdominales, hémorragies digestives. La palpation d’une tumeur abdominale ou une perforation digestive peuvent se voire dans 10 à 20 % des cas.
Il s’agit le plus souvent de tumeur volumineuse au moment du diagnostic (taille moyenne 8-10 cm). Une extension péritonéale ou des métastases hépatiques sont souvent retrouvées au moment du diagnostic.
Le diagnostic anatomopathologique est basé sur la microscopie optique qui retrouve des cellules fusiformes (75 %) ou épithélioïdes (25 %) et surtout sur l’immuno-histochimie qui retrouve une positivité pour le CD34 dans 70 % des cas ainsi que pour le CD117 (c-kit). Cette étude immuno-histochimique ne peut être réalisée que sur des prélèvement tissulaires fixés et donc ne peut être fait sur un examen extemporané.
Des critères cliniques peuvent affirmer le caractère malin de la tumeur :
- métastases hépatiques ou péritonéales
- envahissement locorégional.
Le gradient de malignité varie selon la localisation : il y a plus de GIST à faible risque de malignité au niveau de l’estomac qu’au niveau de l’intestin où prédominent les GIST malins. Le principal critère histologique de malignité est représenté par le nombre de mitoses par grand champ :
- Un taux inférieur à 5 mitoses par grands champs au grossissement 400 est en faveur d’un GIST à faible risque de malignité.
- Un taux supérieur à 5 mitoses par grands champs au grossissement 400 est en faveur d’un GIST à risque élevé de malignité.
Outre cet index mitotique, la taille tumorale a permis à Fletcher (diagnosis of gastrointestinal stromal tumors : a consensus approach. Hum. Pathol. 2002; 33:459-65) de proposer une classification histo-pronostic:
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L’arme principale du traitement, comme pour la majorité des cancers digestifs, est l’exérèse chirurgicale. Les meilleurs résultats sont obtenus après exérèse complète et sans effraction d’une tumeur primitive digestive avec une survie à 5 ans de l’ordre de 50 %.
Si la chirurgie est incomplète, la survie chute à moins de 10 %. De même une exérèse complète mais avec effraction ou rupture per-opératoire de la tumeur entraîne une survie équivalente à une exérèse incomplète .Par contre devant une tumeur stromale ayant envahie des organes de voisinage ,une exérèse monobloc complète donne un taux de survie équivalent à celui des tumeurs localisées . C’est donc le caractère complet de l’exérèse qui est le facteur pronostique déterminant.
L’envahissement ganglionnaire étant inférieur à 10 % des cas, le curage ganglionnaire n’est donc pas systématique.
Le risque de récidive locale après résection péri-tumorale ou énucléation est plus élevé qu’après exérèse partielle de l’organe sur lequel s’est développé la tumeur. Les récidives apparaissent chez 40 % des patients, malgré une exérèse macroscopiquement complète, généralement dans les 2 premières années après l’acte chirurgical. Les taux de résécabilité en cas de récidive sont inférieurs à 50 % avec une médiane de survie aux alentours de 12-18 mois. Ces récidives se présentent sous forme de métastases hépatiques ou de sarcomatose. Les récidives purement locales ne représentent q’un tiers des cas. Les récidives hépatiques sont le plus souvent multiples et bilobaires autorisant rarement une exérèse hépatique.
Le faible taux de résécabilité des récidives et d’une manière générale les tumeurs non résécables sont du ressort du traitement médical en première intention. Ce traitement fait appel à l’Imatinib (Glivec) .Les réponses avec l’Imatinib sur les récidives sont importantes avec des réductions de volume tumoral très impressionnantes mais la réponse complète est exceptionnelle (< 5 %).Il existe par ailleurs 15 % de résistance secondaire par an. Donc au moment où la réponse à l’Imatinib est maximale, on fait appel à la chirurgie pour obtenir une rémission complète.
La réponse maximale est atteinte entre 6 et 9 mois et la chirurgie est donc à discuter après 6 mois de traitement dès qu’il n’y a plus d’amélioration entre 2 scanners successifs. Cette chirurgie s’adresse aux tumeurs primitives localement évoluées rendues résécables grâce à l’Imatinib .Même en cas de réponse complète à l’Imatinib, les patients doivent être opérés en raison du risque de résistance secondaire.
Les complications liées au traitement médical (5 % des cas) sont représentées par des problèmes hémorragiques liés à la rupture de volumineuses masses tumorales qui se sont nécrosées sous traitement.
Compte tenu de la morbi-mortalité opératoire des interventions effectuées en urgence, il est préférable d’opérer les patients de manière programmée entre 6 et 9 mois de traitement.
De même, compte tenu du risque de résistance secondaire, les métastases hépatiques et péritonéales doivent être opérées dès qu’elles deviennent potentiellement accessibles à une chirurgie d’exérèse secondaire.
En cas de re-progression tumorale sous traitement par l’Imatinib, il faut distinguer les progressions de toutes les lésions abdominales (progression systémique) qui correspondent à une résistance à l’Imatinib aux progressions localisées qui correspondent à une résistance partielle à l’Imatinib, provoquant une progression tumorale par acquisition de nouvelles mutations monoclonales résistantes à l’Imatinib.
Quand la progression est systémique, la chirurgie est inutile et il est possible d’augmenter la dose d’Imatinib ou d’essayer de nouvelles molécules.
Lorsqu’une seule lésion progresse sous traitement médical, on peut lui proposer une exérèse chirurgicale tout en continuant le traitement médical sur les autres lésions non résécables. On peut également proposer un traitement par radiofréquence notamment au niveau hépatique pour les lésions qui échappent à l’Imatinib tout en continuant le traitement pour celles qui répondent au traitement médical.
Chez les patients répondeurs à l’Imatinib, le traitement doit être poursuivi jusqu’à progression de la maladie.
La posologie de l’Imatinib (Glivec) dans les GIST non résécables et/ou métastatiques est de 400 mg/jour chez l’adulte. Il doit être pris avec des aliments et un grand verre d’eau pour diminuer le risque d’irritations gastro-intestinales.
Le métabolisme de l’Imatinib est essentiellement hépatique. En cas d’élévation de la bilirubine > 3 fois la normale ou des transaminases > 5 fois la normale , le traitement doit être interrompu jusqu’au retour à un taux de bilirubine < à 1,5 fois la normale et des transaminases à un taux < à 2,5 fois la normale . Le traitement peut alors être repris à une dose réduite chez l’adulte (dose diminuée de 400 à 300 mg/j).
Effets indésirables hématologiques : En cas de neutropénie ou thrombopénie sévères, il est recommandé de diminuer la dose ou d’interrompre le traitement.